Page:Sand - Confession d une jeune fille - vol 2.djvu/73

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un homme singulier que cet Anglais et très-différent de la plupart de ses compatriotes. Les pays maritimes font passer beaucoup de types étrangers sous les yeux. J’avais donc des points de comparaison dans la mémoire, et je ne retrouvais rien en lui des manières roides et de la physionomie froide qui contrastent si fortement avec notre vivacité méridionale. Il avait tant de souplesse et de grâce, qu’on eût pu lui reprocher de manquer à la dignité britannique. Sa figure était charmante, et ses traits fins eussent appartenu au type grec, si sa lèvre supérieure, un peu distante du nez, n’eût, en dépit de tout, révélé sa race. Il était coiffé et rasé avec un soin extrême ; son linge, éblouissant de blancheur, n’empêchait pas ses mains de paraître aussi blanches que celles d’une femme recherchée. Il avait le pied extraordinairement petit et chaussé de maroquin si mince qu’il eût pu aller au bal ainsi. Enfin il y avait dans toute sa personne quelque chose d’aristocratique et de délicat qui devait me faire paraître très-inculte et très-rude à côté de lui.

Ce n’est pas que je fusse grande ou massive. J’étais bien de mon pays pour la finesse des lignes, mais j’étais brune comme une Moresque, mes cheveux étaient rebelles à toute contrainte, je ne portais pas de gants, — je savais écarter adroite-