Page:Sand - Confession d une jeune fille - vol 2.djvu/84

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ma vie pour qu’on ait trouvé du mal à dire de moi.

— Vous n’avez jamais su ce que c’était que le mal ; comment l’auriez-vous commis ? Aussi votre réhabilitation me paraît bien facile, et, si cet Anglais n’est pas le plus vil des hommes et le dernier des hypocrites, c’est lui qui s’en chargera.

Nous arrivions au manoir, où M. Mac-Allan voulut prendre congé en voyant le dîner servi. Il n’était que trois heures ; nous avions conservé, Jennie et moi, les habitudes de ma grand’mère. Jennie avait mis quatre couverts, et elle fit observer à Mac-Allan que le sien était du nombre. Il se défendit peu, il avait visiblement le désir d’accepter. J’insistai brièvement en lui disant que l’hospitalité ne se refusait pas dans notre pays.

— Puisque vous invoquez la coutume, répondit-il, je mets sur votre conscience le délit d’indiscrétion que vous me faites commettre.

Et il s’assit à ma droite, à la place que je lui désignais. Il mangea délicatement comme une femme ; mais il loua tous les mets en bon appréciateur du bien-être, et il complimenta Jennie agréablement sur le service et les friandises. Il parlait bien sur toutes choses, et il avait l’humeur enjouée. C’était la première fois depuis la mort de ma grand’mère qu’un peu de gaieté discrète éveil-