Page:Sand - Constance Verrier.djvu/161

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« Tu aimeras ce soir, » je n’aurais pas voulu le croire, et je m’en serais peut-être défendue. Mais voilà qu’en ne songeant à rien, j’ai senti le trouble inconcevable et la flamme ardente d’un premier amour ! Le soir, quand j’ai cherché à me rendre compte de ce prodige, je me suis dit, parlant à ma personne : Bah ! tu l’aimes parce que tu l’aimes ! Et cela était très-profond, voyez-vous. Je l’aimais par reconnaissance, à cause du bienfait de l’amour qu’il avait mis en moi.

« Il faut vous dire encore que sa physionomie est des plus saisissantes. La duchesse s’en était bien aperçue car elle lui a fait des avances, et, bien qu’il ait été à cet égard-là d’une discrétion impénétrable, — il a tant de délicatesse envers les femmes, lui ! — je suis presque sûre qu’elle a fait tout pour me l’enlever. »

Un grand éclat de rire interrompit la Mozzelli, et, en se retournant, elle vit avec stupeur, à travers les ombres du soir, la duchesse tranquillement assise derrière le berceau, dans l’attitude d’une personne qui s’est mise à l’aise pour écouter.




XIII


La Mozzelli resta interdite ; puis elle prit le parti de se fâcher. — Ah ! madame, ceci est une trahison, dit-elle ; vous dédaignez de dîner chez moi, mais vous ne dédaignez pas de venir écouter aux portes !