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consuelo.

de ces personnes se fût rendue auprès du malade, ce qui se fit pourtant avec le plus de célérité possible, Albert avait disparu. On trouva sa porte ouverte, son lit à peine foulé par le repos d’un instant qu’il y avait pris, et sa chambre dans l’ordre accoutumé. On le chercha partout, et, comme il arrivait toujours en ces sortes de circonstances, on ne le trouva nulle part ; après quoi la famille retomba dans un des accès de morne résignation dont Amélie avait parlé à Consuelo, et l’on parut attendre, avec cette muette terreur qu’on s’était habitué à ne plus exprimer, le retour, toujours espéré et toujours incertain, du fantasque jeune homme.

Bien que Consuelo eût désiré ne pas faire part aux parents d’Albert de la scène étrange qui s’était passée dans la chambre d’Amélie, cette dernière ne manqua pas de tout raconter, et de décrire sous de vives couleurs l’effet subit et violent que le chant de la Porporina avait produit sur son cousin.

« Il est donc bien certain que la musique lui fait du mal ! observa le chapelain.

— En ce cas, répondit Consuelo, je me garderai bien de me faire entendre ; et lorsque je travaillerai avec notre jeune baronne, nous aurons soin de nous enfermer si bien, qu’aucun son ne puisse parvenir à l’oreille du comte Albert.

— Ce sera une grande gêne pour vous, ma chère demoiselle, dit la chanoinesse. Ah ! il ne tient pas à moi que votre séjour ici ne soit plus agréable !

— J’y veux partager vos peines et vos joies, reprit Consuelo, et je ne désire pas d’autre satisfaction que d’y être associée par votre confiance et votre amitié.

— Vous êtes une noble enfant ! dit la chanoinesse en lui tendant sa longue main, sèche et luisante comme de l’ivoire jaune. Mais écoutez, ajouta-t-elle ; je ne crois pas