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consuelo.

renvoyer Saphyr et Panthère au chenil ; et Attila, le faucon, retourna sur son perchoir d’un air mutin et mécontent qui arracha un gros soupir à son maître.

Enfin le baron monte en voiture avec sa fille, et au bout de trois tours de roue s’endort profondément selon son habitude en pareille circonstance. Aussitôt le cocher reçoit d’Amélie l’ordre de tourner bride et de se diriger vers la poste la plus voisine. On y arrive après deux heures de marche rapide ; et lorsque le baron ouvre les yeux, il voit des chevaux de poste attelés à son brancard tout prêts à l’emporter sur la route de Prague.

« Eh bien, qu’est-ce ? où sommes-nous ? où allons-nous ? Amélie, ma chère enfant, quelle distraction est la vôtre ? Que signifie ce caprice, ou cette plaisanterie ? »

À toutes les questions de son père la jeune baronne ne répondait que par des éclats de rire et des caresses enfantines. Enfin, quand elle vit le postillon à cheval et la voiture rouler légèrement sur le sable de la grande route, elle prit un air sérieux, et d’un ton fort décidé elle parla ainsi :

« Cher papa, ne vous inquiétez de rien. Tous nos paquets ont été fort bien faits. Les coffres de la voiture sont remplis de tous les effets nécessaires au voyage. Il ne reste au château des Géants que vos armes et vos bêtes, dont vous n’avez que faire à Prague, et que d’ailleurs on vous renverra dès que vous les redemanderez. Une lettre sera remise à mon oncle Christian, à l’heure de son déjeuner. Elle est tournée de manière à lui faire comprendre la nécessité de notre départ, sans l’affliger trop, et sans le fâcher contre vous ni contre moi. Maintenant je vous demande humblement pardon de vous avoir trompé ; mais il y avait près d’un mois que vous aviez consenti à ce que j’exécute en cet instant. Je ne contrarie donc pas vos volontés en retournant à Prague dans un moment où