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consuelo.

— Eh bien donc, comment vous baptiserons-nous ?

— Bertoni. Ce sera un nom italien quelconque, et une espèce de diminutif du nom d’Albert.

— Il signor Bertoni ! cela fait bien ! dit Joseph en s’efforçant de sourire. »

Mais ce souvenir de Consuelo pour son noble fiancé lui enfonça un poignard dans le cœur. Il la regarda marcher devant lui, leste et dégagée :

« À propos, se dit-il pour se consoler, j’oubliais que c’est un garçon ! »

LXVII.

Ils trouvèrent bientôt la lisière du bois, et se dirigèrent vers le sud-est. Consuelo marchait la tête nue, et Joseph, voyant le soleil enflammer son teint blanc et uni, n’osait en exprimer son chagrin. Le chapeau qu’il portait lui-même n’était pas neuf, il ne pouvait pas le lui offrir ; et, sentant sa sollicitude inutile, il ne voulait pas l’exprimer ; mais il mit son chapeau sous son bras avec un mouvement brusque qui fut remarqué de sa compagne.

« Voilà une singulière idée, lui dit-elle. Il paraît que vous trouvez le temps couvert et la plaine ombragée ? Cela me fait penser que je n’ai rien sur la tête ; mais comme je n’ai pas toujours eu toutes mes aises, je sais bien des manières de me les procurer à peu de frais. »

En parlant ainsi, elle arracha à un buisson un rameau de pampre sauvage, et, le roulant sur lui-même, elle s’en fit un chapeau de verdure.

« Voilà qu’elle a l’air d’une Muse, pensa Joseph, et le garçon disparaît encore ! » Ils traversèrent un village, où, apercevant une de ces boutiques où l’on vend de tout, il y entra précipitamment sans qu’elle pût prévoir son dessein, et en sortit bientôt avec un petit chapeau de paille