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consuelo.

Consuelo et lui saisit le bras pour être sûr que personne ne se mettrait entre eux. D’abord leur pensée fut de sortir ; mais la pluie ruisselait à grand bruit sur le toit de planches de la hutte, et tout le monde était rendormi.

« Restons, dit Joseph à voix basse, jusqu’à ce que la pluie ait cessé. Vous pouvez dormir sans crainte, je ne fermerai pas l’œil, je resterai près de vous. Personne ne peut se douter qu’il y ait une femme ici. Aussitôt que le temps redeviendra supportable, je vous éveillerai, et nous nous glisserons dehors. »

Consuelo n’était pas fort rassurée ; mais il y avait plus de danger à sortir tout de suite qu’à rester. Le chevrier et ses hôtes remarqueraient cette crainte de demeurer avec eux ; ils en prendraient des soupçons, ou sur leur sexe, ou sur l’argent qu’on pourrait leur supposer ; et si ces hommes étaient capables de mauvaises intentions, ils les suivraient dans la campagne pour les attaquer. Consuelo, ayant fait toutes ces réflexions, se tint tranquille ; mais elle enlaça son bras à celui de Joseph, par un sentiment de frayeur bien naturelle et de confiance bien fondée en sa sollicitude.

Quand la pluie cessa, comme ils n’avaient dormi ni l’un ni l’autre, ils se disposaient à partir, lorsqu’ils entendirent remuer leurs compagnons inconnus, qui se levèrent et s’entretinrent à voix basse dans un argot incompréhensible. Après avoir soulevé de lourds paquets qu’ils chargèrent sur leurs dos, ils se retirèrent en échangeant avec le chevrier quelques mots allemands qui firent juger à Joseph qu’ils faisaient la contrebande, et que leur hôte était dans la confidence. Il n’était guère que minuit, la lune se levait, et, à la lueur d’un rayon qui tombait obliquement sur la porte entr’ouverte, Consuelo vit briller leurs armes, tandis qu’ils s’occupaient à les cacher sous leurs manteaux. En même temps, elle s’as-