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Page:Sand - Consuelo - 1856 - tome 2.djvu/77

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consuelo.

auprès de lui, suspendez vos prières, et cherchez dans votre cœur les plus ferventes bénédictions. Dieu vous a exaucé ! »

Elle n’eut pas besoin de s’expliquer davantage. Le vieillard, se retournant vers elle, et rencontrant ses petits yeux clairs animés d’une joie profonde et sympathique, leva ses mains desséchées vers l’autel, en s’écriant d’une voix éteinte :

« Mon Dieu, vous m’avez rendu mon fils ! »

Et tous deux, par une même inspiration, se mirent à réciter alternativement à demi-voix les versets du beau cantique de Siméon : Maintenant je puis mourir, etc.

On résolut de ne pas réveiller Albert. On appela le baron, le chapelain, tous les serviteurs, et l’on écouta dévotement la messe d’actions de grâces dans la chapelle du château. Amélie apprit avec une joie sincère le retour de son cousin ; mais elle trouva fort injuste que, pour célébrer pieusement cet heureux événement, on la fit lever à cinq heures du matin pour avaler une messe durant laquelle il lui fallut étouffer bien des bâillements.

« Pourquoi votre amie, la bonne Porporina, ne s’est-elle pas unie à nous pour remercier la Providence ? dit le comte Christian à sa nièce lorsque la messe fut finie.

— J’ai essayé de la réveiller, répondit Amélie. Je l’ai appelée, secouée, et avertie de toutes les façons ; mais je n’ai jamais pu lui rien faire comprendre, ni la décider à ouvrir les yeux. Si elle n’était brûlante et rouge comme le feu, je l’aurais crue morte. Il faut qu’elle ait bien mal dormi cette nuit et qu’elle ait la fièvre.

— Elle est malade, en ce cas, cette digne personne ! reprit le vieux comte. Ma chère sœur Wenceslawa, vous devriez aller la voir et lui porter les soins que son état réclame. À Dieu ne plaise qu’un si beau jour soit attristé par la souffrance de cette noble fille !