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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND


CCCLIII

À JOSEPH MAZZINI, À LONDRES


Nohant, 23 mai 1852.


Cher ami,

Je ne voudrais pas vous écrire en courant, et pourtant, ou il faut que je vous écrive trop vite, ou il faut que je ne vous écrive pas ; car le temps me manque toujours et je ne puis arriver à une seule journée où je ne sois pas talonnée, ahurie par un travail pressé, des affaires à subir, ou quelque service à rendre. Ma santé, ma vie y succombent. Ne me grondez pas par-dessus le marché.

On a tort de s’irriter dans les lettres contre ceux qu’on aime. Il est évident pour moi que, dans votre dernière, vous faites un malentendu énorme de quelque réflexion que je ne peux me rappeler assez textuellement pour m’expliquer votre erreur. Mais ce que vous me faites dire, je ne vous l’ai pas dit comme vous l’entendez, j’en suis certaine, ou bien votre colère serait trop juste. Vraiment, cher ami, la douleur vous rend irritable et ombrageux, même avec les cœurs qui vous aiment et vous respectent le plus. Qui vous dit que travailler pour votre patrie est une vaine gloire, et que je vous accuse de gloriole ?