Page:Sand - Correspondance 1812-1876, 5.djvu/206

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

chose ou me remercier. Personne ne bouge. Je retourne comme par hasard de leur côté, même silence, même indifférence. Une heure après, j’étais au haut de la falaise, et je demandais au garde-côte ce que c’était que ces gens-là qui ne parlaient ni français, ni italien, ni patois. Il me dit alors le nom, que je n’ai pas retenu.

Dans son idée, c’étaient des Mores, restés à la côte depuis le temps des grandes invasions de la Provence, et il ne se trompait peut-être pas. Il me dit qu’il m’avait vue au milieu d’eux, du haut de son guettoir, et que j’avais eu tort, parce que c’étaient des gens capables de tout ; mais, quand je lui demandai quel mal ils faisaient, il m’avoua qu’ils n’en faisaient aucun. Ils vivaient du produit de leur pêche et surtout des épaves qu’ils savaient recueillir avant les plus alertes. Ils étaient l’objet du plus parfait mépris. Pourquoi ? Toujours la même histoire. Celui qui ne fait pas comme tout le monde ne peut faire que le mal.

Si tu vas dans ce pays-là, tu pourras peut-être en rencontrer à la pointe du Brusq. Mais ce sont des oiseaux de passage, et il y a des années où ils ne paraissent plus.

Je n’ai pas seulement aperçu le Paris-Guide. On me devait pourtant bien un exemplaire ; car j’y ai donné quelque chose sans réclamer aucun payement. C’est à cause de ça, probablement, qu’on m’a oubliée. Pour conclure, je serai à Paris du 20 juin au 5 juillet. Donne-moi là de tes nouveiïes, toujours rue