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est à vous, mais mon âme est à Dieu, et il me défend de vous obéir.

Il salue et sort ; en passant devant la chambre de ce pauvre frère infirme qu’il a juré de ne point abandonner et qu’il chérit toujours, il hésite, il lui crie un adieu déchirant et sort de l’hôtel précipitamment. Où va-t-il ? où trouvera-t-il un refuge contre cette odieuse autorité paternelle qu’aucun lien social ne consacre ? Il n’en sait rien, il marche au hasard, la tête perdue. Il n’ose aller chez sa mère, il craint sa terreur et son désespoir. Il se trouve, sans savoir comment, dans le jardin des Tuileries, et se jette sur un banc, où, dans un mouvement d’angoisse fébrile, il frappe la terre du bout de sa canne. Un bruit métallique se fait entendre, il voit luire quelque chose ; il se baisse et ramasse une pièce de douze sous. Il gratte un peu et en trouve une seconde.

— Allons ! se dit-il, le Ciel vient à mon aide. J’ai quitté l’hôtel sans songer à prendre le moindre argent, et je ne puis en aller chercher ; mais je ne mourrai pas encore de faim aujourd’hui !

Il allait s’éloigner avec ses vingt-quatre sous,