Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/106

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cherche la tendresse. — Est-ce que vous ne l’avez pas trouvée encore, depuis le temps que vous la cherchez ? — Non, disait-il, et pourtant j’ai cherché partout. Je ne sais où elle peut être. — Est-ce que vous l’avez cherchée dans le jardin ? — Non, pas encore, disait-il, et, frappé d’une idée subite, il allait au jardin, se promenait dans toutes les allées, dans tous les coins, s’asseyait sur l’herbe à côté de nous pour regarder nos jeux, d’un air grave, montait chez Deschartres, entrait chez ma mère, et même dans les chambres inhabitées, parcourait toute la maison, ne demandant rien à personne, et se contentant de répondre à qui l’interrogeait « qu’il cherchait la tendresse. » Les domestiques, pour s’en débarrasser, lui disaient : « Ça ne se trouve pas ici ; allez du côté de la Châtre. Bien sûr, vous la rencontrerez par là. » Quelquefois il avait l’air de comprendre qu’on le traitait comme un enfant. Il soupirait et s’en allait. D’autres fois, il avait l’air de croire à ce qu’on lui disait, et regagnait la ville à pas précipités.

Je crois avoir entendu dire qu’il était devenu fou par chagrin d’amour, mais qu’il le serait devenu pour une cause quelconque, parce qu’il y avait d’autres fous dans sa famille. Quoi qu’il en soit, je ne me rappelle pas ce pauvre chercheur de tendresse sans attendrissement. Nous l’aimions, nous autres enfans, sans autre motif que la compassion, car il ne nous disait presque rien,