Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/141

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d’une charrette. L’empereur ayant appris cet accident, dit d’un ton brusque : « Les mères de famille prétendent que je fais tuer tous leurs enfans à la guerre, en voilà un pourtant dont je n’ai pas à me reprocher la mort. C’est comme M. Dupin ! Est-ce encore ma faute si celui-là a été tué par un mauvais cheval ? »

Ce rapprochement entre M. de…… et mon père montre la merveilleuse mémoire de l’empereur. Mais à quel propos se plaignait-il ainsi des mères de famille ? C’est ce que je n’ai pu savoir. Je ne me souviens pas de l’époque précise de la catastrophe de M. de… Ce devait être dans un moment où la France aristocratique abandonnait la cause de l’empereur, et où celui-ci faisait d’amères réflexions sur sa destinée.

Il m’est impossible de me rappeler si nous allâmes à Paris dans l’hiver de 1812 à 1813. Cette partie de mon existence est tout à fait sortie de ma mémoire. Je ne saurais dire non plus si ma mère vint à Nohant dans l’été de 1813. Il est probable que oui, car dans le cas contraire j’aurais eu du chagrin, et je me souviendrais.

Le calme s’était rétabli dans ma tête à l’endroit de la politique. L’empereur était reparti de Paris, la guerre avait recommencé en avril. Cet état de guerre extérieure était alors comme un état normal, et on ne s’inquiétait que lorsque Napoléon n’agissait pas d’une manière ostensible. On l’avait dit abattu et découragé après son