Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/220

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a rien eu que de très légitime à poursuivre leur carrière militaire, lorsqu’ils l’ont pu sans s’abaisser, sous un autre régime.

On a vu dans ce que j’ai cité de l’histoire de M. de Vaulabelle que l’ordre du licenciement fut déguisé sous diverses ordonnances de dissolution partielle. Un soir, la petite place de Nohant et les chemins qui y aboutissent virent une foule compacte de cavaliers encore superbes de tenue venir recevoir les ordres du général Colbert. Ce fut l’affaire d’un instant. Muets et sombres, ils se divisèrent et s’éloignèrent dans des directions diverses.

Le général et son état-major parurent résignés. L’idée d’une Vendée patriotique n’était pourtant pas éclose isolément dans la tête de M. de Colbert. Elle avait parcouru les rangs frémissans de l’armée de la Loire : mais on sait maintenant qu’il y avait là une intrigue du parti d’Orléans à laquelle ils eurent raison de ne point se fier.

Un matin, pendant que nous déjeunions avec plusieurs officiers de lanciers, on parla du colonel du régiment, tombé sur le champ de bataille de Waterloo : « Ce brave colonel Sourd, disait-on, quelle perte pour ses amis et quelle douleur pour tous les hommes qu’il commandait ! C’était un héros à la guerre et un homme excellent dans l’intimité.

— Et vous ne savez ce qu’il est devenu ? dit ma grand’mère. — Il était criblé de blessures,