Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/24

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aimait à faire l’enfant, disait papa aussi, ce qui faisait paraître mon grand-oncle plus jeune qu’elle.

L’appartement qu’il a occupé tout le temps de ma vie où je l’ai connu, c’est-à-dire pendant une vingtaine d’années, était situé rue Guénégaud, au fond d’une cour triste et vaste, dans une maison du temps de Louis XIV, d’un caractère très homogène dans toutes ses parties. Les fenêtres étaient hautes et longues : mais il y avait tant de rideaux, de tentures, de paravens, de draperies et de tapis pour défendre à l’air extérieur de s’introduire par la moindre fissure, que toutes les pièces étaient sombres et sourdes comme des caves. L’art de se préserver du froid en France, et surtout à Paris, commençait à se perdre sous l’Empire, et il s’est tout à fait perdu maintenant pour les gens d’une fortune médiocre, malgré les nombreuses inventions de chauffage économique dont le progrès nous a enrichis. La mode, la nécessité et la spéculation, qui, de concert, nous ont amené à bâtir des maisons percées de plus de fenêtres qu’il ne reste de parties pleines dans l’édifice, le manque d’épaisseur des murailles, et la hâte avec laquelle ces constructions laides et fragiles se sont élevées, font que plus un appartement est petit, plus il est froid et coûteux à réchauffer. Celui de mon grand-oncle était une serre-chaude, créée par ses soins assidus dans une maison épaisse et massive, comme devraient l’être toutes les habitations d’un