Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/413

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traîtreusement de ma générosité, revint sur moi et me poussa de toute sa force. Mon pied heurta une grosse cruche d’eau qui roula avec moi dans le cabinet ; la D…… m’y enferma à double tour, et s’enfuit en vomissant un torrent d’injures.

Ma situation était critique. J’étais littéralement dans un bain froid ; le cabinet était fort petit et la cruche énorme ; lorsque je fus relevée j’avais encore de l’eau jusqu’à la cheville. Pourtant je ne pus m’empêcher de rire en entendant la D…… s’écrier : « Ah ! la perverse, la maudite. Elle m’a fait mettre tellement en colère, que je vais être obligée de retourner me confesser. J’ai perdu mon absolution. » Moi, je ne perdis pas la tête, je grimpai sur les rayons du cabinet pour me mettre à pied sec, j’arrachai une feuille blanche d’un cahier, je trouvai plumes et encre, et j’écrivis à Mme Eugénie à peu près ce qui suit. « Madame je ne reconnais maintenant d’autre autorité sur moi que la vôtre. Mlle D…… vient de faire acte de violence sur ma personne et de m’enfermer. Veuillez venir me délivrer, etc. »

J’attendis que quelqu’un parût. Maria Gordon, je crois, vint chercher aussi un cahier dans le cabinet, et, en voyant ma tête apparaître à la lucarne, elle eut grand’peur et voulut fuir. Mais je me fis reconnaître et la priai de porter mon billet à Mme Eugénie, qui devait être au jardin. Un instant après Mme Eugénie parut, suivie de Mlle D… Elle me prit par la main et m