Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/472

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point l’attrait de la nouveauté. Déjà j’en avais goûté le côté simple et admirable, mais ma grand’mère avait si bien conspiré pour me faire trouver les miracles ridicules, et elle m’avait tant répété les facéties de Voltaire sur l’esprit malin, transporté du corps d’un possédé à celui d’un troupeau de cochons, enfin elle m’avait si bien mise en garde contre l’entraînement, que je me défendis par habitude et restai froide en relisant l’agonie et la mort de Jésus.

Le soir de ce même jour, je battais tristement le pavé des cloîtres, à la nuit tombante. On était au jardin, j’étais hors de la vue des surveillantes, en fraude, comme toujours ; mais je ne songeais pas à faire d’espiégleries, et ne souhaitais point me trouver avec mes camarades. Je m’ennuyais. Il n’y avait plus rien à inventer en fait de diablerie. Je vis passer quelques religieuses et quelques pensionnaires qui allaient prier et méditer dans l’église isolément, comme c’était la coutume des plus ferventes aux heures de récréation. Je songeai bien à verser de l’encre dans le bénitier, mais cela avait été fait ; à pendre Whisky par la patte à la corde de la sonnette des cloîtres, c’était usé. Je m’avouai que mon existence désordonnée touchait à sa fin qu’il me fallait entrer dans une nouvelle phase : mais laquelle ? Devenir sage ou bête ? Les sages étaient trop froides, les bêtes trop lâches. Mais les dévotes ferventes, étaient-elles heureuses ? Non,