point lâche, je n’aurais pas pu l’être, l’eussé-je essayé.
Au bout de quatre ou cinq jours, Anna, remarquant que j’étais silencieuse et absorbée, et que j’allais à l’église tous les soirs, me dit d’un air stupéfait : « Ah ça, mon cher Calepin, qu’est-ce à dire ? On jurerait que tu deviens dévote ! — C’est fait, mon enfant, lui répondis-je tranquillement. — Pas possible ! — Je t’en donne ma parole d’honneur. — Eh bien, reprit-elle après avoir réfléchi un instant, je ne te dirai rien pour t’en détourner. Je crois que ce serait inutile. Tu es une nature passionnée ; je l’ai toujours pensé. Je ne pourrai pas te suivre sur ce terrain-là. Je suis une nature plus froide, je raisonne. J’envie ton bonheur, je t’approuve de ne point hésiter ; mais je ne crois pas que jamais j’arrive à la foi aveugle. Si ce miracle s’opérait pourtant, je ferais comme toi, j’en conviendrais sincèrement. — M’aimeras-tu moins ? lui demandai-je. — À présent tu t’en consolerais aisément, reprit-elle. La dévotion absorbe et dédommage de tout. Mais comme j’ai pour ta sincérité la plus parfaite estime, je resterai ton amie quoi qu’il arrive. » Elle ajouta d’excellentes paroles encore, et se montra toujours pleine de raison, d’affection et d’indulgence pour moi.
Sophie ne prit pas beaucoup garde à mon changement. La diablerie passait de mode. Ma conversion lui portait le dernier coup. Peut-être