étions-nous toutes également ennuyées de notre inaction, sans nous l’être avoué les unes aux autres. D’ailleurs Sophie était un diable mélancolique, et parfois elle avait de courts accès de dévotion, mêlés de profondes tristesses qu’elle ne voulait ni expliquer ni avouer.
Celle que je craignais le plus d’affliger était Fanelly. Elle m’épargna la peine de lui refuser de courir davantage avec elle, elle me prévint. « Eh bien, ma tante, me dit-elle, te voilà donc rangée ? Soit ! Si tu t’en trouves bien, j’en serai heureuse, et si cela te fait plaisir, je me rangerai aussi. Je suis capable de devenir dévote pour faire comme toi et pour être toujours avec toi. »
Elle l’eût fait comme elle le disait, cette généreuse et abondante nature, si cela eût dépendu d’un mouvement de son cœur. Mais ses idées n’avaient pas la fixité et l’exclusivisme des miennes. D’ailleurs parmi les diables il n’y en avait que deux. Anna et moi, qui fussions susceptibles de ce qu’on appelait une conversion. Les autres n’avaient jamais protesté, elles n’étaient pas pieuses, parce qu’elles étaient dissipées, mais elles croyaient quand même, et du jour où la diablerie cessa, elles furent plus régulières dans leurs exercices de piété sans devenir dévotes exaltées pour cela.
Anna était esprit fort. C’était bien le mot pour elle, qui avait de l’esprit tout de bon et de la force dans la volonté. Pour moi, que l’on