Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/506

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vivre renfermée, seulement dans une ville ; je ne pensais pas beaucoup à mon salut. Un sermon que j’entendis changea toutes mes idées et m’inspira un si grand désir de plaire à Dieu que je n’eus plus ni plaisir, ni repos dans ma famille. Ce sermon prêchait le renoncement, la mortification. Je me demandai ce que je pouvais faire de plus agréable à Dieu et de plus cruel pour moi-même, et je trouvai que quitter la campagne, perdre ma liberté, me séparer pour toujours de ma famille, serait un véritable martyre pour moi. Aussitôt j’y fus résolue. J’allai trouver le prêtre qui avait prêché, et je lui dis que j’avais la vocation. Il ne voulut pas me croire et me conduisit à l’évêque afin que cet homme savant dans la religion examinât si ma vocation était véritable. L’évêque me demanda si j’étais malheureuse chez mes parens, si j’étais dégoûtée de mon pays, de mon état, si enfin j’avais quelque sujet de dépit ou de colère pour quitter comme cela tout ce qui me retenait chez nous. Je lui répondis que dans ce cas-là ma vocation ne serait pas grande, et que je n’y croyais que parce qu’elle m’imposait les plus grands sacrifices que je pusse m’imaginer. Quand l’évêque m’eut bien interrogée sans me trouver en défaut, il me dit : « Oui, vous avez une grande vocation, mais il faut obtenir le consentement de vos parens. »

Je retournai chez nous, et je parlai d’abord à mon père, mon père me dit que si je retournais