Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/562

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les lumières s’abaissent et reprennent leur niveau. On recommença plusieurs fois le même tour sans qu’elle s’en rendît compte. C’était à peu près la scène du niais au logis de la sorcière, dans les Pilules du Diable. Je trouvai la chose si plaisante que je ne me fis pas grand scrupule de recevoir le mot d’ordre et d’exhausser comme les autres. Mais enfin la comtesse s’aperçut de nos sottises et se leva furieuse. Il était convenu qu’on ferait aussitôt des mines de mauvais garçons pour l’effrayer. Chacune se pose en conspirateur, les bras croisés, le sourcil froncé, et des chuchotemens font entendre autour d’elle le mot terrible de révolte. La comtesse était incapable de tenir tête à l’orage. Persuadée que le moment fatal est venu, elle s’enfuit en faisant flotter son grand châle comme une mouette qui étend ses ailes et qui prend son vol à travers les tempêtes.

Elle avait perdu l’esprit ; elle traversa le jardin pour se réfugier et se barricader dans sa chambre. Pour augmenter sa terreur, nous jetâmes les flambeaux, les chandelles et les tabourets par la fenêtre au moment où elle passait. Nous ne voulions ni ne pouvions l’atteindre ; mais ce vacarme accompagné des cris : « Révolte ! révolte ! » pensa la faire mourir de peur. Pendant une heure, nous fûmes livrés à nous-mêmes et à nos rires inextinguibles, sans que personne osât rétablir l’ordre. Enfin nous entendîmes