Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/670

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faire. Je n’ai à confesser ni mensonge, ni dureté, ni impiété d’aucune sorte. J’ai toujours cru en Dieu. — Mais écoute ceci, ma fille : je ne l’ai pas assez aimé. J’ai manqué de courage, voilà ma faute, et depuis le jour où j’ai perdu mon fils, je n’ai pu prendre sur moi de le bénir et de l’invoquer en aucune chose. Il m’a semblé trop cruel de m’avoir frappé d’un coup au-dessus de mes forces. Aujourd’hui qu’il m’appelle, je le remercie et le prie de me pardonner ma faiblesse. C’est lui qui me l’avait donné, cet enfant, c’est lui qui me l’a ôté, mais qu’il me réunisse à lui, et je vais l’aimer et le prier de toute mon âme. »

Elle parlait d’une voix si douce et avec un tel accent de tendresse et de résignation que je fus suffoquée de larmes et retrouvai toute ma ferveur des meilleurs jours pour prier avec elle.

Le vieux curé, attendri profondément, s’éleva et lui dit, avec une grande onction et dans son parler paysan, qui augmentait avec l’âge : « Ma chère sœur, je serons tous pardonnés, parce que le bon Dieu nous aime, et sait bien que quand je nous repentons, c’est que je l’aimons. Je l’ai bien pleuré aussi, moi, votre cher enfant, allez ! et je vous réponds ben qu’il est à la droite de Dieu, et que vous y serez avecques lui. Dites avec moi votre acte de contrition, et je vas vous donner l’absolution. »

Quand il eut prononcé l’absolution, elle lui ordonna de faire rentrer tout le monde, et me