Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/97

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escapades en esprit de mortification. Il le rendait horriblement malheureux, et il fallut que l’enfant fût de bronze pour ne pas éclater sous cette dure contrainte.

Ce n’était pas le latin qui faisait son martyre, on ne le lui enseignait pas ; c’étaient les mathématiques, pour lesquelles il avait montré de l’aptitude, et il en avait véritablement. Il ne haïssait pas l’étude en elle-même, mais il préférait le mouvement et la gaîté dont il avait un impérieux besoin. Deschartres lui enseignait aussi la musique. Le flageolet étant son instrument favori, Hippolyte dut l’apprendre bon gré mal gré ; on lui fit emplette d’un flageolet en buis, et Deschartres, armé de son flageolet d’ébène monté en ivoire, lui en appliquait de violens coups sur les doigts à chaque fausse note. Il y a un certain menuet de Fischer qui aurait dû laisser des calus sur les mains de l’élève infortuné. Cela était d’autant plus coupable de la part de Deschartres que, quelque irrité qu’il fût, il pouvait toujours se vaincre jusqu’à un certain point avec les personnes qu’il aimait. Il n’avait jamais brutalisé l’enfance de mon père, et jamais il ne s’emporta contre moi jusqu’à un essai de voie de fait, qu’une seule fois en sa vie. Il avait donc une sorte d’aversion pour Hippolyte, à cause des mauvais tours et des moqueries de celui-ci, et pourtant il lui portait, à cause de mon père, un véritable intérêt. Rien ne l’obligeait à l’instruire, et