bien plus destructives que tout ce que je vous ai dit fermentaient dans mon cerveau, et s’y tenaient victorieuses pendant des jours entiers. Ces pensées, c’était le doute, c’était l’athéisme qui pénétrait en moi comme un venin. Il y avait des jours où j’étais si las de combattre, où l’espoir du salut me luisait si faible et si lointain, que je me rejetais de toute ma force dans la vie présente. Eh bien ! me disais-je, soyons heureux au moins un jour, soyons homme puisque nous ne pouvons être ange. Pourquoi une loi de mort pèserait-elle sur moi ? Pourquoi consentirais-je à être retranché de la vie des hommes, en échange d’une chimère d’avenir ? Ils sont heureux, ils sont libres, les autres ! Ils respirent à l’aise, ils marchent, ils commandent, ils aiment, ils vivent, et moi je suis un cadavre étendu sur un cercueil, la dépouille d’un homme attachée à un débris de religion ! Ils placent leur espoir en cette vie, ils peuvent le réaliser, car ils peuvent agir.
Page:Sand - Lélia, édition Dupuy-Tenré, 1833, tome 1.djvu/204
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