Page:Sand - L Autre.djvu/114

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CÉSAIRE.

Vous en doutez ?

HÉLÈNE.

Pourtant… s’il est infidèle le premier ?…

CÉSAIRE.

Mais… ce n’est pas à l’époux seulement que l’on a juré fidélité ! c’est à soi-même et à…

HÉLÈNE.

À soi-même ? Mais, si l’amour est le dévouement absolu, on peut s’abandonner, se trahir soi-même, se perdre, se damner, comme on dit !

CÉSAIRE.

Quelles idées exorbitantes vous avez là !

HÉLÈNE, exaltée.

N’importe, je veux savoir… Je suppose qu’une jeune fille… épouse un homme qui la délaisse et l’humilie et… qu’un autre… se trouvant là… l’aimant avec ardeur… lui fasse oublier… tous ses devoirs… et devienne… tout pour elle… qu’est-ce que… l’enfant, devenu grand, pensera de sa mère et de… l’autre ?

CÉSAIRE, s’essuyant le front.

Attendez ! vous me bouleversez ! De telles suppositions dans votre cerveau, de telles paroles dans votre bouche… (À part.) Qu’est-ce qui se passe donc aujourd’hui ? Est-ce la fin du monde ?

HÉLÈNE.

Vous ne voulez pas me répondre ? Eh bien, moi, je me réponds ! L’enfant pardonnera forcément à sa mère. Mais il ne pourra jamais absoudre l’autre. Ai-je tort ?

CÉSAIRE.

Ah ! un moment, permettez ! L’autre étant le père… il y a le cri de la nature que la voix de la société ne peut étouffer.