Page:Sand - L Homme de neige vol 2.djvu/110

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celle d’une femme grande et maigre, non pas svelte et belle comme devait être celle que représente le portrait, mais livide et dévastée comme si elle sortait de sa tombe, et la robe grise, souillée, usée, avec ses rubans noirs dénoués et pendants, semblait véritablement traîner encore la terre du sépulcre. Cela était si triste et si effrayant, mon cher ami, que je fermai les yeux pour me soustraire à cette pénible vision. Quand je les rouvris, fut-ce une seconde ou une minute après, je ne saurais m’en rendre compte, la figure était tout à fait devant moi. Elle avait descendu l’escalier, dont le craquement s’était fait encore entendre, et elle me regardait d’un œil hagard, avec une fixité que je pourrais appeler cadavéreuse, pour exprimer l’absence de toute pensée, de tout intérêt, de toute vie. C’était véritablement une morte qui était là debout devant moi, à deux pas de moi, et je restai comme fasciné, fort laid moi-même probablement, et peut-être les cheveux dressés sur la tête, je n’en répondrais pas…

— Ma foi, dit Christian, c’est là une apparition désagréable, et je crois qu’à votre place j’aurais juré, ou cassé quelque chose. Cela dura-t-il longtemps ?

— Je n’en sais rien. Il m’a paru que cela ne finissait pas, car je fermai encore les yeux pour m’en