Page:Sand - L Homme de neige vol 2.djvu/111

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débarrasser, et, quand je les rouvris, le spectre marchait ; il s’en allait du côté du lit. Ce qu’il y fit, je ne saurais vous le dire. Il me sembla qu’il agitait les rideaux, qu’il se penchait comme pour parler à quelqu’un qu’il y voyait et que je n’y voyais pas. Et puis il fit mine d’ouvrir la fenêtre ; mais je crois qu’il ne l’ouvrit pas. Enfin il revint vers moi. Je m’étais enhardi un peu. J’essayai de me raisonner. Je tâchai de me rendre compte de sa figure. Cela fut au-dessus de mes forces. Je ne voyais que ses grands yeux morts dont je ne pouvais détacher les miens. Au reste, cette fois, le fantôme passa vite. S’il s’apercevait de ma présence, il ne semblait pas qu’il en fût irrité ou surpris. Il flotta incertain par la chambre, essaya de retourner à l’escalier, et parut ne pas pouvoir le retrouver. Ses mains décharnées interrogeaient les murs, et tout à coup je ne vis plus rien. Un sifflement de bise courut encore dans l’air et dans mes oreilles ; puis il cessa, et, comme, au milieu de cette crise, je ne me sentais pas fou le moins du monde, je m’aperçus fort bien de la disparition des bruits insolites et de l’image fantastique.

» Je me tâtai, c’était bien moi. Je me pinçai la main, je le sentis fort bien. Je regardai la bouteille de rhum, je l’avais à peine entamée. Je n’étais donc ni en état d’extase ni en état d’ivresse. Je n’avais