Page:Sand - L Homme de neige vol 3.djvu/17

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le traîneau versa. Ce ne fut pas la faute du cheval, mais celle du traîneau, qui ne pouvait se lier assez fidèlement à ses mouvements, quelque ingénieusement construit qu’il pût être. Ces chutes peuvent être graves ; mais elles sont si fréquentes, que, sur la quantité, il en est peu qui comptent. Le traîneau du lieutenant, bien qu’averti par les accidents de celui qui lui frayait le passage, fut aussi deux ou trois fois culbuté. On roulait dans la neige, on se secouait, on remettait le traîneau sur sa quille, et on repartait sans faire plus de réflexion sur l’aventure que si l’on eût mis pied à terre pour alléger au cheval un peu de tirage. Ailleurs, une chute fait rire ou frémir ; ici, elle entrait tranquillement dans les choses prévues et inévitables.

Christian éprouvait un bien-être indicible dans cette course émouvante.

— Je ne peux pas vous exprimer, disait-il au bon major, qui s’occupait de lui avec une fraternelle sollicitude, combien je suis heureux aujourd’hui !

— Dieu soit loué, cher Christian ! Cette nuit, vous étiez mélancolique.

— C’était la nuit, le lac, dont la belle nappe de neige avait été souillée par la course, et qui avait l’air d’une masse de plomb sous nos pieds. C’était le hogar éclairé de torches sinistres comme des