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Page:Sand - L Homme de neige vol 3.djvu/55

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toi et ton ombre ; je ne parlerai pas ; j’ai juré de ne jamais dire ce que je sais.

— Aie patience, dit le danneman à Christian. Avec elle, c’est toujours ainsi au commencement. Prie-la doucement, et elle te dira ta destinée.

Christian renouvela sa prière, et la voyante répondit enfin en cachant toujours ses yeux dans ses mains pâles, et en prenant un style poétique qui semblait appris par cœur :

— Le dévorant hurle sur la bruyère, ses liens se brisent ; il se précipite !… Il se précipite vers l’est, à travers les vallées pleines de poisons, de tourbe et de fange.

— Est-ce à dire qu’il nous échappera ? dit le danneman, qui écoutait religieusement sa sœur.

— Je vois, reprit celle-ci, je vois marcher, dans des torrents puants, les parjures et les meurtriers ! Comprenez-vous ceci ? Savez-vous ce que je veux dire ?

— Non, je n’en sais rien du tout, répondit Christian, qui reconnut le refrain des anciens chants Scandinaves de la Voluspa, et qui crut reconnaître aussi la voix des galets du Stollborg.

— Ne l’interromps pas, dit le danneman. Parle toujours, Karine ; on t’écoute.