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Page:Sand - L Homme de neige vol 3.djvu/89

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et vexatoire qui lui fit perdre toute sa popularité, et qui, de fait, replongea dans la misère ce peuple qu’il avait délivré de la tyrannie des nobles. L’usage fréquent de l’eau-de-vie est-il une nécessité de ces climats rigoureux ? Christian le pensait d’autant moins que cette boisson, fabriquée par le danneman en personne, et dont il était fier, arrachait littéralement le gosier. Le brave homme pressait son hôte d’en boire largement, ne comprenant pas qu’après avoir tué deux ours, il n’éprouvât pas le besoin de s’enivrer un peu. Christian ne pouvait pousser jusque-là l’obligeance, et, bien qu’il eût souhaité être de force à griser Bœtsoï sans se griser lui-même, circonstance qui eût peut-être amené la prompte découverte du secret de la famille, il se borna à boire du thé laissé à son intention par le major, et qui lui fut servi bien chaud dans une tasse de bois très-délicatement taillée et sculptée par le jeune Olof.

Le jeune homme se sentait un peu humilié d’avoir pris le plaisir princier de tuer un ours aux dépens de ses amis ; car, en somme, cet ours appartenait au danneman, comme tout gibier appartient sans conteste à celui qui le découvre sur ses terres. On avait fait présent à Christian de sa capture, c’est-à-dire qu’on l’avait payée pour lui. Il apprit avec plaisir du danneman que ce payement n’avait pas encore été