Page:Sand - La dernière Aldini. Simon.djvu/144

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vous vous plaignez quelquefois de l’être du vôtre, et je suis obligée de jouer devant lui mon rôle jusqu’à ce que je trouve l’occasion de m’échapper de la scène. Mais, sous mon masque, j’ai gardé une âme libre, et, depuis que je possède ma raison, je suis résolue à ne me marier que selon mon cœur. Cependant, pour éloigner tous ces fades et impertinents patriciens dont vous me parlez, il me fallait un prétexte ; j’en cherchai un dans les préjugés mêmes qui étaient communs à mes prétendants et à ma famille, et, blessant à la fois l’orgueil des uns et flattant celui des autres, je me prévalus de l’antiquité de ma race pour refuser la main d’hommes qui, tout nobles qu’ils étaient, ne se trouvaient pas encore, disais-je, assez nobles pour moi. Je réussis de la sorte à écarter tous ces importuns sans mécontenter ma famille ; car elle avait beau traiter mes refus de caprices d’enfant, et faire à ces poursuivants rebutés des excuses sur l’exagération de mon orgueil, elle n’en était pas moins, au fond, enchantée de ma fierté. Pendant un certain temps, je gagnai à cette conduite une plus grande liberté. Mais enfin le prince Grimani, mon beau-père, me dit qu’il était temps de prendre un parti, et me présenta son neveu, le comte Ettore, comme l’époux qu’il me destinait. Ce nouveau fiancé me déplut comme les autres, plus encore peut-être ; car l’excès de sa sottise m’amena bientôt à le mépriser complètement ; ce que voyant le prince, et pensant que ma mère, qui est excellente et m’aime de toute son âme, pourrait bien m’aider dans ma résistance contre lui, il résolut de m’éloigner d’elle, pour me contraindre plus aisément à l’obéissance. Il m’envoya ici vivre en tête à tête avec sa sœur et son neveu. Il espère que, forcée de choisir entre l’ennui et mon cousin

Ettore, je finirai par me décider pour celui-ci ; mais il se trompe bien. Le comte Ettore est, en tout point, indigne de moi, et j’aimerais