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Page:Sand - La dernière Aldini. Simon.djvu/321

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suivait de lui-même comme un chien, elle soutint Jeanne de son bras robuste, et la conduisit jusqu’aux premières maisons. Là, elle lui remit sa lettre pour Simon, et, après l’avoir embrassée, elle remonta sur son cheval.

« Bon Dieu ! dit Jeanne, si je ne craignais pas les mauvaises langues, je vous emmènerais avec moi coucher à la ville. Voilà le vent qui se lève ; il fait noir comme dans l’enfer, et si la neige venait à tomber ! Hélas ! je suis effrayée de vous voir partir ainsi, seule, à cette heure, par ce froid mortel.

— Allons, bonne mère, ne craignez rien ; donnez-moi votre bénédiction, elle me préservera de tout danger. Je vous salue, je vous aime, et, comme une véritable héroïne de roman, je m’élance à cheval dans la nuit orageuse. »

Jeanne, transie de froid, resta pourtant immobile à l’entrée de la rue jusqu’à ce qu’elle eût cessé d’entendre le galop de Sauvage sur la terre durcie par la gelée. « Ô neige ! ne tombe pas, murmura la vieille femme en se signant ; lune blanche, lève-toi vite ; et vous, sainte Vierge, veillez sur elle ! »

Lorsqu’elle arriva au domicile de maître Parquet, elle fut enchantée d’apprendre de la servante que l’avoué était au café, et que Simon était seul dans l’étude. Elle entra, et le vit appuyé contre le poêle, la tête dans ses mains. Le bruit des petits sabots plats de sa mère le fit tressaillir. Avant qu’elle eût parlé, il avait reconnu son pas encore égal et ferme. Il s’élança dans ses bras, et pour la première fois de sa vie il s’abandonna au besoin de se laisser consoler par la tendresse maternelle. Un torrent de larmes coula de ses yeux sur le sein de la vieille Jeanne.

« Vous avez fui votre mère, et votre mère court après vous, lui dit-elle avec l’accent grondeur de la tendresse.