Page:Sand - Le Beau Laurence.djvu/125

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tour à tour domestiques et soldats. Je vous ai dit que c’étaient de beaux hommes graves qui n’entendaient pas un mot de français. Une espèce de lieutenant, qui s’appelait Nikanor (je ne l’oublierai jamais), et qui commandait en l’absence du prince, parlait très-bien italien, mais il ne nous parlait jamais. Nous n’avions point affaire à lui, ses fonctions étant toutes militaires. C’était un grand vieillard dont le regard oblique et la lèvre mince ne nous plaisaient pas. Nous nous imaginions, non sans raison, qu’il avait un profond mépris, peut-être une secrète aversion pour nous.

Notre service immédiat était fait par le frère Ischirion et par le petit Meta, et autant que possible nous nous passions d’eux. Le moine était malpropre, curieux, obséquieux et faux. Le groom était bavard, familier, loustic mais canaille, disait Moranbois.

Ce ne fut donc pas sans déplaisir que nous vîmes notre petit Marco se lier jusqu’au tutoiement réciproque avec ce garçon et s’isoler de nous de plus en plus pour courir avec lui dans les cloîtres et dans les offices. Marco répondait à nos reproches qu’il était le fils d’un ouvrier de Rouen, comme