Page:Sand - Le Château des désertes - Les Mississipiens, Lévy, 1877.djvu/98

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mêmes. Le service intérieur est fait aussi par des femmes de journée que l’on congédie quand elles ont balayé et rangé ; et vous savez, Monsieur, les hommes sont si simples ! Quand il n’y a pas de femmes au courant des affaires d’une maison, on ne peut rien savoir.

— C’est vraiment désespérant, ma chère madame Peirecote, dis-je en retenant une bonne envie de rire.

— Oui, Monsieur, oui ! Ah ! si j’étais plus jeune, et si je ne craignais pas d’attraper un rhumatisme en faisant le guet, je saurais bientôt à quoi m’en tenir. Par exemple, ces jours derniers, la servante qui a fait les lits a trouvé au pied de celui d’une des demoiselles des pantoufles dépareillées. On a beau se cacher, on n’est jamais à l’abri d’une distraction. Eh bien, Monsieur, devinez ce qu’il y avait à la place de la pantoufle perdue durant le sabbat !

— Quoi ! un gros crapaud vert avec des yeux de feu ? ou bien un fer de cheval qui a brûlé les doigts de la pauvre servante ?

— Non, Monsieur, un joli petit soulier de satin blanc avec un nœud de beaux rubans rose et or !

— Diantre ! cela sent le sabbat bien davantage. Il est évident que ces demoiselles avaient été au bal sur un manche à balai !

— Chez le diable ou ailleurs ; il y avait eu bal aussi au château, car on avait justement entendu des airs de danse, et les parquets s’en ressentaient ; mais quels étaient les invités, et d’où sortait le beau monde ? car on n’a vu ni voitures ni visites d’aucune espèce autour du château, et à moins que la bande joyeuse ne soit descendue et remontée par les tuyaux de cheminée, je ne vois pas pour qui ces demoiselles ont mis des souliers blancs à nœuds rose et or.

J’aurais écouté madame Peirecote toute la nuit, tant