Page:Sand - Le Dernier Amour, 1882.djvu/187

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— Ah ! voyez, s’écria Félicie, les voici déjà ! Ils viennent regarder leur domaine. Ils ne sont pas si enivrés que vous disiez ! Ils pensent déjà au lendemain.

— Ils sont dans le vrai, dans la nature. Ils songent au nid tout de suite, pendant la chanson d’amour et de printemps.

— Comment, vous êtes là, cousine ? dit Tonino tout surpris, en doublant le pas.

— Oui, répondit-elle avec douceur ; je suis venue préparer ton nid, comme dit M. Sylvestre. Est-ce ici que tu veux demeurer ?

— Oui, certes, si j’ai le moyen de l’arranger quand le fermier sortira.

— Le fermier sort demain, et, demain, on commence les travaux. Regarde le plan avant que la brise du soir l’efface. Voici votre chambre, très-grande, pour contenir les berceaux et les petits lits… Voici la salle pour causer, manger, faire de la musique. Voici l’étable doublée, séparée en trois pour les élèves des deux âges et les mères. Voici le grenier à fourrages, le séchoir, le rucher, la fontaine, etc.

— Mais c’est un rêve, s’écria Tonino ; il me faudra vingt ans de travail pour payer tout cela !

— Vous ne payerez rien, lui dis-je. C’est votre cadeau de noces en sus de la dot.

Tonino eut un beau mouvement très-spontané, improvisation de l’intelligence artiste, ou cri sincère du cœur.