Page:Sand - Le Marquis de Villemer.djvu/241

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me faire admirer la beauté du travail, mon frère prend ma place, et quand je me retourne, je le trouve installé entre le fauteuil de la duchesse et celui de sa fille, à deux pas de mademoiselle Diane, et tout à fait mêlé au groupe et à la causerie des demoiselles.

— Est-ce vrai, mon fils ? dit la marquise au duc avec un sentiment d’inquiétude.

— C’est très-vrai, répondit le duc avec candeur. Je commençais le siège de la place, je prenais position. Je comptais qu’Urbain allait manœuvrer de manière à venir à mes côtés : point, le traître me laisse seul exposé au feu, et ma foi ! je m’en tire comme je peux. Que s’est-il passé pendant ce temps-là ? Il va vous le dire.

— Hélas ! je le sais de reste, dit la marquise désolée ; il a pensé à autre chose !

— Pardon, maman, répondit le marquis, je n’en ai eu ni l’intention ni le loisir, car la duchesse, laissant Gaëtan aux prises avec les jeunes personnes, m’a emmené à l’écart, et, riant malgré elle, m’a dit ces mémorables paroles, que je vous rapporte textuellement : — Mon cher marquis, il se passe ce soir ici quelque chose qui ressemble à une scène de comédie. Figurez-vous que la jeune personne, … qu’il est inutile de nommer, vous prend pour votre frère, et par conséquent s’obstine à prendre votre frère pour vous. On a beau lui dire qu’elle se trompe, elle prétend que nous la mystifions, qu’elle n’est pas notre dupe, et… faut-il tout vous dire ? …

— Oui, certes, madame la duchesse ; vous êtes trop