Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol2.djvu/134

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plus que ses grandes mains blanches, convenablement teintées à l’avenant de son visage.

Il avait trouvé moyen de bien dissimuler sa fine chemise sous un sarrau de campagne, et s’était chaussé de mauvaises pantoufles de feutre ; un tablier gras, brochant sur le tout, dissimulait ses chausses de drap, qui n’étaient pas très-voyantes ; car il s’était habillé fort simplement pour l’expédition nocturne projetée à Brilbault, et cette circonstance tournait à bien dans la circonstance nouvelle.

Averti par Mario que Macabre paraissait être un butor bête et vaniteux, il sentit qu’il devait lui inspirer de la confiance, et, dès les premiers mots, il reconnut qu’aucune hyperbole ne serait trop rude à lui faire avaler.

— Illustre et vaillant capitaine, lui dit-il en le saluant jusqu’à terre, je vous prie d’excuser ma pauvre sotte de femme qui ne m’a pas fait connaître à quel grand homme de guerre et d’esprit nous avions affaire. Il est bien vrai que je suis malade de la goutte ; mais votre air avenant et martial ferait revenir un mort, et je me souviens trop bien d’avoir servi sous vos drapeaux pour ne point vouloir, dussé-je laisser ma vie au feu de mes fourneaux, vous servir encore selon les petits talents que le ciel m’a donnés.

— Bon ! bon ! dit Saccage au capitaine, il n’est rien de tel que de menacer ! À présent, les voilà tous qui veulent avoir servi sous vos ordres.

— Ça vaut fait, répliqua Macabre, pourvu qu’il me serve bien à cette heure. Et, après tout, monsieur le lieutenant, il n’est rien d’impossible que ce vieux homme m’ait connu au temps jadis, dans les guerres du pays. J’y ai assez donné de ma personne pour qu’un chacun