Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol2.djvu/135

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s’en souvienne. Maître-queux ! tu me raconteras tes campagnes au dessert ; car je vois bien, à ton air et à ton pas, que la goutte ne t’a point ôté l’allure d’un soldat. Tu as une drôle de senteur, ajouta-t-il, frappé du parfum dont, en dépit de son déguisement, toute la personne du marquis était imprégnée ; c’est comme une senteur de confitures ! N’importe ! je gage que tu as été un peu lansquenet ?

— Je le fus une année durant, répondit Bois-Doré, qui savait par cœur toute l’existence aventureuse de maître Pignoux et la damnable jeunesse de Macabre. Voire ! je vous vis bien harceler les huguenots de Bourges durant le massacre des prisons, en compagnie de ce terrible vigneron que l’on appelait le Grand Vinaigrier…

— Hein ! s’écria l’Italien en regardant son capitaine d’un air moqueur, quand je vous le disais que vous fûtes grand papiste, mon capitaine !

— Chaque chose a son temps, répliqua Macabre avec un calme philosophique ; mon père, qui lors était capitaine de la grosse tour de Bourges avec feu M. de Pisseloup, protégea les pauvres parpaillots du pays tant qu’il put… Moi, je tirai de côté quand il n’y eut pas moyen de mieux faire. Mais j’ai repris le droit chemin, et j’y suis plus franc du collier que vous, monsieur l’Italien, qui cachez des reliques sous votre corselet d’Allemagne.

L’Italien répondit avec aigreur, et Macabre, mécontent de lui voir élever le ton en présence de ses pages et de ses estradiots, bien qu’ils entendissent peu le français, lui imposa silence et demanda au marquis le menu du repas qu’il pouvait lui servir.

Bois-Doré, qui n’avait soulevé l’incident des massacres catholiques que pour voir dans quelles eaux naviguait