Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol2.djvu/194

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Mario, alerte et compatissant, se mettait à la recherche, pendant qu’Adamas, toujours prévoyant, faisait creuser dans un champ voisin un grand trou pour enterrer les morts faits à l’ennemi. Ceux du pays furent traités avec plus d’honneur, et on se mit en quête de M. Poulain pour leur dire des prières en attendant l’inhumation.

On fêta les plus courageux. Presque tout le monde l’avait été à la dernière heure ; cependant on retrouva tout le long du jour de pauvres hébétés, blottis encore sous des fagote ou dans des coins de hangar, où ils se fussent laissé brûler ou enfumer sans rien dire, tant la peur les avait saisis.

Au milieu de toutes ces scènes tragiques ou burlesques, Bois-Doré se multipliait avec le bon Guillaume pour veiller à tout.

En dépit des choses horribles ou navrantes qui se présentaient devant eux à chaque pas, ils avaient cet entrain un peu enivré qui suit toujours la fin heureuse d’une grande crise.

Ce que l’on avait à déplorer et à regretter était encore peu de chose au prix de tout ce qui eût pu arriver.

Le marquis était remonté à cheval pour vaquer plus vite à ses devoirs charitables, dans un équipage incompréhensible pour la plupart de ceux qui le voyaient passer.

Il avait encore son tablier de cuisine devenu haillon, il est vrai, et taché du sang de ses ennemis ; si bien que plusieurs de ses vassaux crurent qu’il s’était ceint d’un lambeau d’étendard pour témoigner de sa victoire. Ses grandes moustaches avaient grillé dans l’incendie, et le mortier de toile de maître Pignoux, écrasé par le chapeau que Bois-Doré avait mis dessus à la hâte, lui descendait