Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol2.djvu/226

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

En effet, Lauriane refusa de mettre pied à terre à l’auberge du Geault-Rouge, où l’échange projeté aurait pu avoir quelque chance de succès.

Mario espéra qu’un peu plus loin, sur la route, elle se raviserait et accepterait quelque autre combinaison ; mais on eut beau lui remontrer que les choses pouvaient s’arranger sans compromettre le marquis, elle fut inflexible.

— Non, non, disait-elle, personne ne croira que le marquis n’a pas fermé les yeux volontairement. Qui sait, mon pauvre Mario, si on ne te garderait pas en otage jusqu’à ce que l’on m’eût retrouvée ? Et quant à Adamas, il irait en prison certainement. C’est ce que je ne veux point, et, de gré ni de force, je ne consentirai à m’échapper ; car, si vous y tentez, je crierai et mènerai du bruit pour me faire reprendre.

Lauriane fut inébranlable dans sa résolution. Il fallut perdre l’espoir de la soustraire à la captivité, et l’on arriva à Bourges beaucoup plus abattu et découragé que l’on n’était parti de Briantes.

Le résultat de cette soumission fut assez favorable.

Le lieutenant-général, M. Biet, qui avait compté sur la rébellion du marquis pour gâter ses affaires, fut fort surpris de le voir se présenter devant lui avec Lauriane, et réclamer pour elle une retraite honorable et les égards auxquels la dignité de sa conduite lui donnait droit.

M. Biet dut se radoucir, feindre un grand regret de la mesure de rigueur qu’il attribuait aux ordres secrets du Prince, et consentir à ce que Lauriane fût conduite au couvent des religieuses de l’Annonciade, dont Jeanne de France, tante de son illustre aïeule Charlotte d’Albret, avait été la fondatrice. Lauriane avait là quelques amies, et il lui fut permis de garder Mercédès pour la servir.