Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol2.djvu/230

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Le futur abbé et lui découvrirent, en s’accostant, qu’ils demeuraient sous le même toit.

Lucilio s’attendait à être dénoncé et tracassé. Il n’en fut rien.

M. Poulain se plut dans sa société, et témoigna beaucoup d’intérêt à Mario lorsqu’il le vit arriver pour prendre ses leçons.

M. Poulain était trop intelligent pour n’avoir pas fait un retour sur lui-même, et il sentait combien peu il devait compter sur le prince de Condé ; car l’archevêque de Bourges refusait de le faire abbé avant que M. le Prince l’y eût autorisé ; M. le Prince ne paraissait pas fort pressé de consentir.

L’existence de nos personnages fut donc assez paisible durant cette sorte d’exil à Bourges. Ils y goûtèrent même plus de sécurité qu’ils ne l’avaient fait à Briantes dans ces derniers temps.

Mais le marquis s’ennuyait bien d’avoir rompu avec toutes ses habitudes de luxe, de bien-être et d’activité. Il se faisait simple et petit pour ne pas attirer l’attention sur Lauriane dans une ville où l’esprit de la Ligue était mal éteint, et où le règne court et violent de la Réforme avait laissé de fâcheux souvenirs.

Mario s’efforçait d’être gai pour le distraire ; mais le pauvre enfant ne l’était plus lui-même, et, en lui lisant l’Astrée à la veillée, il pensait à autre chose, ou soupirait à ces peintures des ruisseaux, des jardins et des bosquets qui lui faisaient sentir l’ennui et la dépendance de sa situation présente.

Aussi Mario était pâle et devenait rêveur ; il travaillait à s’instruire avec un grand acharnement, et son plaisir était de tenir Lauriane au courant de ses études, en lui