Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol2.djvu/262

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son dessein de ratification royale pour son titre de marquis.

De nouveaux édits paraissaient chaque jour contre les usurpations de qualités ; édits peu respectés, car les nouveaux et anciens nobles continuaient à prendre des noms de terre fort contestables. Leur obscurité les garantissait. Bois-Doré fut forcé de reconnaître qu’il n’avait pas de meilleur refuge.

Et puis il lui fallait bien s’apercevoir aussi que l’on n’était pas plus beaux messieurs à Paris les uns que les autres, du moment que l’on n’était pas de la cour. On se retournait bien un peu, dans les promenades et à la place Royale, pour regarder le contraste de son étrange figure fardée avec la délicieuse fraîcheur de Mario, et, pendant quelque temps, le bonhomme, se croyant reconnu, souriait aux passants et portait la main à son feutre, prêt à accueillir des avances que l’on ne songeait point à lui faire. Cela lui donnait un grand air d’incertitude hébétée et de courtoisie banale qui prêtait à rire. Les dames assises, ou marchant l’éventail à la main, sous les jeunes arbres du Cours-la-Reine, se disaient :

— Quel est donc ce grand vieux fou ?

Et, si ces dames étaient femmes du monde où Bois-Doré avait reparu, ou bourgeoises du quartier où il s’était logé, il s’en trouvait parfois une pour répondre :

— C’est un gentilhomme de province qui se pique d’avoir été l’ami du feu roi.

— Quelque Gascon ? Tous ont sauvé la France ! ou quelque Béarnais ? Ils sont tous frères de lait du bon Henri !

— Non, un vieux mouton de Berry ou de Champagne. Il y a des Gascons partout.