Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol2.djvu/276

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de gouverner notre maison et nos biens en notre absence.

— Votre meilleure amie… Parlez-vous de Mercédès, la belle Morisque ? J’aurais cru que vous lui préfériez, avec d’autres sentiments, il est vrai, une amie plus jeune et plus belle encore.

— Parlez-vous de madame de Beuvre ? reprit Mario avec une franchise qui faisait ressortir la curiosité insinuante de M. Poulain ; il m’est facile de vous répondre comme je répondrais à toute la terre. C’est là, en effet, une personne que j’ai aimée avec ardeur dans mon enfance et que je respecterai toute ma vie ; mais son amitié pour moi est fort tranquille, et vous pouvez m’interroger sur son compte sans aucun détour.

— N’est-elle point mariée encore ?

— Je n’en sais rien, monsieur. En voyage depuis quelques mois, nous n’avons guère de nouvelles de nos amis éloignés.

M. Poulain examina Mario à la dérobée. Il avait le calme d’un cœur brisé, mais non l’affaissement d’une âme épuisée.

— Ignorez-vous, dit le recteur, que M. de Beuvre était sur la flotte anglaise devant La Rochelle ?

— Je sais qu’il y fut tué, et que Lauriane ne dépend plus que d’elle-même.

— Elle était en Poitou lorsque le duc de la Trémouille, après l’abandon des Anglais, alla abjurer l’hérésie au camp du roi.

— Elle ne l’y suivit pas, monsieur ! dit vivement Mario. Elle demanda à partager la captivité de l’héroïque duchesse de Rohan, qui refusait de se soumettre, et, n’ayant pu obtenir cette grâce, elle s’apprêtait à revenir en Berri quand nous avons quitté notre province.