Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol2.djvu/292

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Aristandre était là, il est vrai, se plaçant comme une muraille mobile autour de son maître ; mais Mario, au plus chaud de l’assaut, se retourna plus d’une fois pour voir le panache gris du vieillard qui dépassait tous les autres, et, chaque fois qu’il le vit flotter, il remercia Dieu et se fia à son étoile.

L’affaire fut si impétueusement menée, qu’elle ne coûta pas cinquante hommes à la France. Ce fut une de ces miraculeuses journées où la foi est dans tous, et où rien ne se trouve impossible.

La position emportée, Mario s’était lancé sur la route de Suse, à la poursuite des fuyards, parmi lesquels était le duc de Savoie en personne, lorsqu’il vit venir sur sa droite un cavalier masqué, courant ventre à terre.

— Arrêtez, arrêtez-vous ? lui cria cet homme ; le service du roi avant tout ! Portez mes dépêches. Je vous connais ; je me fie à vous !

Et, en disant ces mots, le cavalier se laissa glisser à terre, évanoui, pendant que son cheval, épuisé, tombait sur ses deux genoux.

Mario fut le seul de ses jeunes compagnons qui eut le courage de renoncer à une dernière prouesse ; il sauta à terre, et ramassa le paquet cacheté que le courier venait de laisser échapper.

Mais, comme il allait tourner bride vers le camp du roi, un groupe d’hommes armés qui ne paraissaient pas avoir pris part à l’action et qui, évidemment, poursuivaient le messager sans savoir où ils se jetaient, débusqua par la droite et s’élança vers Mario en lui criant en italien qu’il aurait la vie sauve s’il rendait le paquet sans donner l’alarme.

Mario se hâta d’appeler au secours de toutes ses forces. Personne ne l’entendit. Son père était encore loin