Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol2.djvu/293

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en arrière, ses compagnons déjà loin en avant. Il fit feu de sa carabine pour se faire mieux entendre, et, pour ne pas perdre son coup, il le dirigea sur les assaillants, dont un roula sur la poussière. Mario n’attendit pas les autres. Il était remonté à cheval ; il fila comme une flèche au milieu d’une grêle de balles qui se logèrent, partie dans son chapeau, partie dans le talus qui côtoyait.

Il entendit du bruit derrière lui, des cris, des coups. Il n’en tint compte, il ne se retourna pas.

Il n’avait pas vu le visage, il n’avait pas reconnu la voix du messager. Il regrettait d’abandonner à l’ennemi un homme qui savait se rendre si utile. Mais il s’agissait avant tout de sauver la dépêche, et c’est par miracle qu’il la sauvait.

Sa course rétrograde étonna ceux qu’il rencontra. À peu de distance du quartier royal, il vit accourir son père, qui s’effraya de le voir passer ainsi sans s’arrêter, et qui le crut blessé et emporté par son cheval. Mais Mario lui cria :

— Rien ! rien !

Et il disparut dans un tourbillon de poussière.

Il fut d’abord repoussé d’auprès de la personne du roi, et, tout aussitôt, prenant son parti, il s’élança vers celle du cardinal.

Le cardinal s’était vu exposé déjà à tant de projets d’assassinat, qu’on ne l’approchait pas facilement. Mais les dépêches que Mario brandissait au-dessus de sa tête et l’heureuse physionomie du digne jeune homme inspirèrent une subite confiance au grand ministre. Il le manda près de lui, et reçut le paquet, que Mario, dans sa hâte, ne songea pas à lui présenter le genou en terre.