Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol2.djvu/297

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Un matin, il retourna à Chaumont comme pour faire une promenade. Il s’enquit vainement de la petite bohémienne. Il poussa plus loin vers le mont Genèvre, et apprit que le corps d’une femme avait été trouvé par là, dans la matinée du 3 mars. On l’avait d’abord crue morte de froid ; mais, lorsqu’on l’enterra, ses lèvres et son rabat portaient des traces particulières de brûlure, comme si elle eût avalé par surprise quelque poison corrosif. Les montagnards qui communiquèrent ce commentaire à Mario, lui proposèrent de lui montrer le cadavre. On l’avait enfoui dans la neige provisoirement, la terre étant trop glacée en cet endroit pour être aisément creusée.

Mario s’empressa de constater que ce cadavre était bien celui de Bellinde. Donc, Pilar n’avait pas menti. Elle s’était défaite de sa compagne : elle pouvait, par les mêmes moyens, se défaire de sa rivale.

Mario retourna à Suse en toute hâte et confia tout à son père.

— Laissez-moi courir à Briantes, lui dit-il. Attendez-moi ici pour continuer la campagne, s’il y a lieu. Si la paix est définitivement signée, vous le saurez dans quelques jours et viendrez ma rejoindre sans vous presser et sans vous fatiguer. Seul, j’irai plus vite, assez vite pour devancer encore cette détestable fille, qui n’a ni le moyen ni la force de courir la poste.

Le marquis céda. Mario fit sur-le-champ ses dispositions pour partir le lendemain matin avec Clindor.

Dans la soirée, M. Poulain vint avec précaution. Il était tout joyeux et tout mystérieux en même temps.

— Monsieur le marquis, dit-il à Bois-Doré quand il fut seul avec lui et Mario, je vous devais déjà beaucoup, et je devrai ma fortune à votre aimable fils ! La précieuse dépêche