Page:Sand - Mademoiselle Merquem.djvu/34

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tout le monde n’eût pu dire aussi bien qu’elle ; mais le charme qui émanait de son accent et de son attitude protestaient en dépit d’elle-même contre le soin qu’elle prenait de se faire nulle pour se faire impénétrable.

M. de Montroger ne se piquait probablement pas d’être aussi mystérieux, car je le vis, un instant après, rempli d’une anxiété qu’il ne prenait guère la peine de me cacher.

— J’ai cru, me dit-il, vous entendre prononcer mon nom, là, tout à l’heure. Cela m’a rendu inquiet. Je me suis demandé si vous n’aviez pas à réclamer de moi quelque service que je n’aurais pas songé à vous offrir.

— Et que j’aurais prié mademoiselle Merquem de vous demander à ma place ? Voilà, monsieur, un détour ingénieux et charmant pour m’amener à vous répéter le bien que l’on vient de me dire de vous.

Il voulut me répondre, prononça quelques mots sans suite, posa sa main sur la mienne d’une façon amicale, presque paternelle, et s’éloigna, me laissant confondu de sa gaucherie et de sa bonté.

Il ne me fallut pas l’observer davantage pourvoir qu’il était solennellement amoureux de mademoiselle Merquem, frémissant, jaloux, craintif, transparent comme un écolier. Le hasard me plaça bientôt auprès d’une vieille dame fort aimable que j’avais déjà vue chez ma tante, et qui ne demandait qu’à causer.

— Vous observez Montroger, me dit-elle ; il vous amuse ?

— Mais non, je ne me permets pas…

— Permettez-vous tout ce que vous voudrez, il ne s’en apercevra pas. Ce n’est pas l’échantillon le moins