Page:Sand - Mauprat.djvu/91

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hors de l’enceinte. Nous arrivâmes donc sans encombre à la sortie du souterrain ; mais, au dernier moment, je fus saisi d’un accès de fureur. Je jetai ma torche par terre, et, m’appuyant contre la porte :

— Tu ne sortiras pas d’ici, dis-je à la tremblante Edmée, sans être à moi.

Nous étions dans les ténèbres ; le bruit du combat ne venait plus jusqu’à nous. Avant qu’on vînt nous surprendre en ce lieu, nous avions mille fois le temps d’échapper. Tout m’enhardissait, Edmée ne dépendait plus que de mon caprice. Quand elle vit que les séductions de sa beauté ne pouvaient plus agir sur moi pour me porter à l’enthousiasme, elle cessa de m’implorer et fit quelques pas en arrière dans l’obscurité.

— Ouvre la porte, me dit-elle, et sors le premier, ou je me tue ; car j’ai pris ton couteau de chasse au moment où tu l’oubliais sur le bord de la trappe, et, pour retourner chez tes oncles, tu serais obligé de marcher dans mon sang.

L’énergie de sa voix m’effraya.

— Rendez ce couteau, lui dis-je, ou, à tout risque, je vous l’ôte de force.

— Crois-tu que j’aie peur de mourir ? dit-elle avec calme. Si j’avais tenu ce couteau là-bas, je ne me serais pas humiliée devant toi.

— Eh bien ! malheur ! m’écriai-je, vous me trompez, vous ne m’aimez pas ! Partez ! je vous méprise, je ne vous suivrai pas.

En même temps, j’ouvris la porte.

— Je ne veux pas partir sans vous, dit-elle ; et vous, vous ne voulez pas que nous partions sans que je sois déshonorée. Lequel de nous est le plus généreux ?

— Vous êtes folle, lui dis-je, vous m’avez menti, et