Page:Sand - Mauprat.djvu/97

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échelle qui, à défaut de l’escalier rompu, conduisait aux étages supérieurs de la tour ; son chien le suivit avec une merveilleuse adresse. Ils redescendirent bientôt, et nous apprîmes qu’une lueur rouge montait sur l’horizon du côté de la Roche-Mauprat. Malgré la haine que j’avais pour cette demeure et pour ses hôtes, je ne pus me défendre d’une sorte de consternation en entendant dire que, selon toute apparence, le manoir héréditaire qui portait mon nom était pris et livré aux flammes ; c’était la honte et la défaite, et cet incendie était comme un sceau de vasselage apposé sur mon blason parce que j’appelais les manants et les vilains. Je me levai en sursaut, et, si je n’eusse été retenu par une violente douleur au pied, je crois que je me serais élancé dehors.

— Qu’avez-vous donc ? me dit Edmée, qui était près de moi en cet instant.

— J’ai, répondis-je brusquement, qu’il faut que je retourne là-bas ; car mon devoir est de me faire tuer plutôt que de laisser mes oncles parlementer avec la canaille.

— La canaille ! s’écria Patience en m’adressant pour la première fois la parole ; qui est-ce qui parle de canaille ici ? J’en suis, moi, de la canaille ; c’est mon titre, et je saurai le faire respecter.

— Ma foi ! ce ne sera pas de moi, dis-je en repoussant le curé, qui m’avait fait rasseoir.

— Ce ne serait pourtant pas pour la première fois, répondit Patience avec un sourire méprisant.

— Vous me rappelez, lui dis-je, que nous avons de vieux comptes à régler ensemble.

Et, surmontant l’affreuse douleur de mon entorse, je me levai de nouveau, et, d’un revers de main, j’envoyai don Marcasse, qui voulut succéder au curé dans le rôle de pacificateur, tomber à la renverse au milieu des cendres. Je ne lui voulais aucun mal, mais j’avais les mouvements