Page:Sand - Monsieur Sylvestre.djvu/21

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ne suis pas un aigle, mais je crois que ma femme a raison. Et d’ailleurs je vous aime, et, si vous devez être quelque chose, je ne serais pas fâché d’y avoir contribué. C’est donc pour vous dire… Je ne suis pas un Crésus, mais si une demi-douzaine de billets de mille vous étaient agréables…

Je ne le laissai pas achever. Je l’embrassai, mais je refusai net. Il insista d’autant plus, et j’eus quelque peine à lui faire comprendre que, pour jouir de la liberté qui était tout mon dédommagement dans une situation précaire, je ne devais pas commencer par m’enchaîner à une dette.

Madame Diamant, qui est une grosse personne commune au premier abord, mais une de ces âmes généreuses et délicates que l’occasion vous révèle, comprit mieux ma fierté et sut me faire accepter le dévouement de son mari dans des conditions possibles.

— Vous allez travailler, dit-elle, c’est bien ; mais il ne vous faudrait pas trop de misère ; car, si c’est joli de la supporter quand on l’a, il n’est pas nécessaire de la chercher quand on peut faire autrement. — Voulez-vous me charger de vous faire durer le peu que vous avez sans qu’il nous en coûte un centime, à mon mari et à moi ?

— Voyons, madame Diamant, un bon conseil est un grand service, et je serai heureux d’accepter de vous quelque chose.

— Eh bien, vous avez parlé, pendant le dîner, de vous retirer à la campagne ; vous avez dit que vous aimiez la campagne en toute saison. Nous avons à Vaubuisson une petite maison où nous n’allons que l’été, le dimanche. C’est petit, mais c’est propre, et il y a des cheminées qui ne fument pas. Prenez-y une